La douleur tambourine sur mon crane comme un voisin excédé par le bruit. Six heures trente, l'heure de soulever mon enveloppe corporelle pour lui insuffler quelques protéines et autres excitants nécessaires.Je pivote péniblement la tête, un son de cloche me rappelle ma chute d'hier soir, je regarde ma femme qui ronfle paisiblement.
La cloche sonne à rythme mesuré suivant les battements de mon cœur tel un poisson pilote. Les ronflements de madame saupoudrent ce son lourd d'une poudre de rêve dans laquelle elle se trouve surement. L'odeur a disparu, enfin je crois. J'aimerais la sentir de nouveau. Je le désire si fort que je pourrais presque la sentir encore. Ou le contraire.De la chambre a coucher je passe au salon, du salon a la cuisine. Foutu mal de crane!
La bouilloire chante en quelques secondes et la mélodie monotone qui s'en dégage me plonge dans mes pensées.Sans m'en rendre compte je me retrouve de nouveau au salon, assis sur mon canapé. La mélopée de la bouilloire de la cuisine résonne dans ma tête, elle semble me parler. Je ferme les yeux et imagine le Djinn qui pourrait s'en échapper. Je glousse, seul. Enfin je le pensais. Du flou de mes pensées émerge une image familière: Le chat.
Je pousse un petit rire nerveux. La bête me sors un son que j'imagine être un "bonjour". Mes songes me rattrapent.
J'entreprends de faire quelques mouvements du cou pour faire disparaitre la douleur. BONG, mauvaise idée. Un flash désagréable part du haut de ma colonne de vertébré et prend possession de mon crane. Une crampe du muscle sterno-cléido-mastoidien droit me saisi et me force a un mouvement brusque de la nuque sur mon coté gauche.
Un homme se tient assis a coté de moi, je ne l'ai jamais vu. Il me dit une phrase d'une traite que je ne comprends pas, le ton est questionnant. Je m'attrape la nuque de la main droite pour essayer de faire passer la douleur et si possible cette hallucination. Je remets péniblement ma tête droite. Un bref coup d'œil a gauche, l'homme a disparu. Un coup d'œil a droite (on ne sait jamais), rien."t'escertainquec'estcequetuveuxvraiment?".
Hein?
Le temps de décomposer chaque mots de cette phrase la bouilloire se rappelle a moi. Le ton est excité, le sifflement un cri. Je cours à la cuisine, la bouilloire est presque vide et des gouttelettes bouillantes forment une flaque sur les plaques vitro-céramique rachetées a ma sœur. L'eau s'est évaporée. Foutue bouilloire.
"T'es certain que c'est ce que tu veux vraiment?"
La voila la question de mon génie hallucinatoire. Dois-je répondre? Mais merde, moi je veux rien à part ne plus avoir mal au crane et de prendre mon petit déjeuner tranquille.
Je fais couler ce qui reste d'eau très chaude dans mon bol, mets mon earl grey en sachet dedans et retourne dans le salon. Un plan de travail presque vide attire mon regard.
Une chaine hifi ridiculeusement petite par rapport au meuble trône devant mes yeux. Tout le reste de mon intérieur semble avoir été pensé pour mettre en évidence ce vide.Un petit rire nerveux sort malgré moi du fond de ma gorge. Les quelques CD parsemés devant la mini chaine hifi ne font qu'accentuer cette impression de ridicule.
"T'es certain que c'est ce que tu veux vraiment?"Je réponds "oui" mentalement, non pas pour répondre à la question dont je ne comprends pas la portée ni le sens mais pour qu'elle cesse de m'obséder le temps que je consomme mon réveil.
Le jour se lève sur la ville, la lumière entre par les lattes des volets bleu charrette importés d'une lointaine région et remplie la pièce en une séquence ordonnée et apaisante. Il va faire chaud aujourd'hui, le chat le sent et se pose déjà sur le chauffage éteint pour profiter des premiers rayons de soleil.
J'ai bien envie de prendre ma journée, prétextant d'avance ma chute d'hier soir.
Un nouveau balayage du regard de la pièce me mène à ce plan de travail désert et me rappelle que je suis, encore aujourd'hui, le DJ SANS PLATINES...










